Stocker, ce n’est pas toujours garder. Même en Europe, les discussions que vous engagez avec ChatGPT ne sont pas systématiquement hébergées sur des serveurs européens. OpenAI, la société qui pilote cette technologie, conserve temporairement certains échanges pour entraîner ses modèles, sauf si vous demandez explicitement le contraire. Dans certains cas, vos données peuvent transiter par des infrastructures américaines, où les règles du RGPD n’ont pas la même portée.
ChatGPT et vos données : ce qu’il faut vraiment savoir
Chaque jour, des millions de conversations transitent sur ChatGPT, l’intelligence artificielle signée OpenAI. Depuis une récente avancée judiciaire dans le dossier New York Times vs OpenAI, une nouvelle règle prépare un véritable bouleversement : dès juin 2025, toutes les discussions, même effacées, devront être conservées sans exception. Seuls certains comptes professionnels, Enterprise, Education ou ceux ayant activé l’option Zero Data Retention (ZDR), échappent à cette règle.
En pratique, cela signifie plusieurs choses :
- La mémoire personnalisée permet une expérience sur mesure. Libre à chacun de l’ajuster ou de la couper dans les paramètres.
- L’obligation de conservation vide de sa substance la suppression classique : pour les utilisateurs standards, effacer ne veut plus dire disparaître.
- Les sociétés exploitant ChatGPT doivent revoir leurs procédures et répertorier ce sous-traitant, notamment si des données sensibles entrent dans la boucle.
Quels risques pour la confidentialité et la sécurité ?
Impossible de négliger les failles potentielles : fuites, mauvaises manipulations, pertes de contrôle… Dès qu’un nom, une information pro, un dossier transite sur ChatGPT, le risque existe. Ceux qui disposent de comptes dédiés, avec option ZDR ou usages API spécifiques, disposent, eux, de leviers réels pour s’assurer la suppression immédiate des échanges. Mais ces options sont loin d’être généralisées, et la majorité des utilisateurs joue sans filet. Même avec le RGPD, les lois et contraintes américaines, comme le Cloud Act, passent outre certains garde-fous. Les entreprises doivent donc ajuster leur pratique, verrouiller les accès et limiter le partage de données sensibles. Ce n’est pas une simple précaution : la frontière entre innovation et respect de la vie privée devient ténue, et chacun doit choisir son niveau de vigilance.
Qui gère les informations partagées avec ChatGPT ?
La structure de gestion des données utilisateur repose d’abord sur l’ossature technique et contractuelle d’OpenAI. Suite à l’affaire New York Times vs OpenAI, il devient impossible de garantir l’effacement total des échanges pour tous, à l’exception des clients disposant d’options spécifiques comme le Zero Data Retention via l’API ou sur des comptes professionnels. Une adaptation du registre RGPD des entreprises clientes s’impose, les DPO devant se montrer particulièrement vigilants sur la conformité réelle de ces nouveaux traitements.
Les conversations transitent par des serveurs sécurisés et servent également à l’amélioration continue des modèles d’OpenAI, sauf désactivation ou contrat spécial. Cette désactivation, réservée à certaines organisations ou abonnements, garantit que les requêtes ne sont ni stockées ni exploitées pour l’entraînement. Pour la majorité, la mémoire personnalisée reste modifiable, mais la rétention des discussions s’applique par défaut.
- Les entreprises doivent intégrer ChatGPT dans leur registre en tant que sous-traitant RGPD.
- Le DPO contrôle la conformité et veille à ce que rien de trop sensible ne soit transmis ou traité.
- Les particuliers, eux, gardent la main sur des réglages minimes mais ne peuvent pas s’opposer à la conservation obligatoire des échanges.
Au-delà de la gestion de la vie privée, la question de la propriété intellectuelle se pose : toute information partagée avec ChatGPT entre dans le périmètre d’OpenAI, sauf mention formalisée dans un contrat. Les experts n’hésitent pas à passer par l’API ZDR pour limiter l’exposition de leurs secrets les plus stratégiques.
Où sont stockées les données et quelles garanties de sécurité ?
Les données utilisateur de ChatGPT sont principalement hébergées sur des serveurs OpenAI aux États-Unis. À partir de mars 2025, les clients pourront, sur demande, choisir un stockage en Europe. Pourtant, même une localisation européenne ne constitue pas un rempart absolu : la législation américaine, en particulier le Cloud Act, autorise l’accès aux données par les autorités américaines, quels que soient les choix de stockage. Cette réalité met à mal la notion de souveraineté numérique, en particulier pour les entreprises et administrations soumises au RGPD.
Pour rassurer ses clients européens, OpenAI promet le stockage et le traitement en Europe, sur simple demande. Est-ce suffisant ? Les responsables sécurité continuent de s’interroger, car une faille ou intrusion reste toujours du domaine du possible. Conséquence : de nouveaux acteurs européens, Mistral (Mixtral), Scaleway, Infomaniak, Exoscale, montent au créneau avec des offres d’hébergement souverain et audité. Ces alternatives techniques convainquent de plus en plus d’entreprises vigilantes sur la confidentialité de leurs flux.
Quant à ceux qui veulent une protection maximale, ils se tournent vers l’intégration d’outils de défense supplémentaires. Par exemple, Forcepoint DLP surveille le trafic vers les applications d’IA générative, tandis que Forcepoint ONE SSE inspecte le contenu échangé et limite le risque d’exfiltration de données sensibles via ChatGPT. Les structures les plus exigeantes combinent pare-feu, outils DLP et audits rigoureux, tout en comparant les garanties réglementaires proposées par des acteurs européens ou américains.
Données sensibles et confidentialité : jusqu’où va la protection ?
En théorie, ChatGPT collecte des données personnelles variées : prénoms, habitudes d’utilisation, tonalité des échanges… Mais tout ce qui touche à des données sensibles, médicales, financières, stratégiques, devrait rester à l’écart de l’outil. Pourtant, dans les faits, l’attrait de la facilité conduit parfois à confier à l’IA des informations confidentielles, notamment dans les entreprises.
Le passage à la conservation imposée des discussions depuis juin 2025 change la donne : dès lors, toutes les conversations, même supprimées par l’utilisateur, restent stockées par OpenAI, à l’exception des options de type Enterprise, Education ou API ZDR. Là, l’activation de la rétention nulle supprime immédiatement les conversations, sans qu’elles ne servent à l’entraînement du modèle. Pour tous les autres cas d’usage, aucune échappatoire n’existe désormais.
Chez OpenAI et ses entreprises clientes, la protection s’appuie sur trois piliers :
- Chiffrement des échanges et des données stockées
- Contrôles d’accès perfectionnés chez l’éditeur
- Audit RGPD et politique de sécurité renforcée chez les utilisateurs professionnels
Le RGPD impose une vigilance absolue à chaque étape d’utilisation et de circulation des données personnelles identifiables. Face au danger d’une fuite ou d’une faille, chacun doit revoir ses process, former ses équipes et limiter ce qui est partagé. Parce que la question ne se limite plus à la technologie, mais touche aussi à la confiance et à la réputation. Alors, jusqu’où iront nos choix ? Dans les coulisses de ChatGPT, la protection des données devient un test permanent de nos exigences et d’une certaine idée de la prudence numérique.


